Récit écrit à l'Atelier Ecriture du 29 novembre

C’est déjà le jour et Neila n’est toujours pas là. Clément sait qu’il doit s’inquiéter, crier, s’effondrer peut-être, mais il tient là. Il est debout, face à la fenêtre, guettant la moindre silhouette au bout de l’allée.

Il avait sans cesse espéré la revoir. Depuis qu’elle avait été prise par les sirons. Maintenant, il le sait. Bientôt ce sera fini. Il sait faire confiance. Loic, son mentor, cet homme qui préparé, conduit au but, et même façonné, il ne pourrait jamais le décevoir.

« Oui, il va me la ramener. » Dit-il en soupirant avant de se retourner brusquement. Il y a quelqu’un dans le domaine. Aux champs d’oliviers. Son ouïe, à cette distance, peut toujours distinguer les bruits et elle sait aussi les localiser.

C’est sûr, quelqu’un est là et n’est pas sensé l’être.

« Qu’est-ce qui se passe ? » 

Personne ne devait savoir où il se cachait.

Il s’éleva alors, comme un appareil qu’on déplie. Il devint grand au point que les moulures du haut plafond lui frôlèrent les cheveux, puis décoiffèrent sa frange qui lui donnaient, quelques secondes auparavant, son air jeune et candide. Il était dorénavant difforme. Il flottait sur un bas du corps monstrueux, et quand il finit de se transformer, il glissa comme un serpent à la porte arrière du domaine.

Il dût se baisser pour la franchir malgré son hauteur de trois mètres, puis il se faufila dehors comme un démon.

« Loic, il m’a trahi. » Se dit-il.

Malgré la forme qu’il prenait maintenant, ses pensées étaient toujours les mêmes. Il avait peur pour Neila. Personne d’autres ne pourrait la protéger contre les sirons. Les sirons l’engloutiraient, la détruiraient si elle ne leur échappe pas pour le rejoindre. Ils la détruiraient, et lui aussi par la même occasion.

C’est elle, elle seule dorénavant, qu’il peut continuer à aimer.

Il inspectait le champ d’oliviers depuis quelque minutes seulement et déjà, la moitié, des cent hectares avaient déjà été fouillée. Il glissait à une vitesse inimaginable, tailladant les troncs par son passage comme une scie mortelle. Il avançait à une vitesse folle à la mesure de sa détresse.

Et il finit par trouver l’origine du bruit. Elle était là. Neila. Assise, adossée à un olivier. Elle était calme comme si elle l’attendait pour un rendez-vous déjà fixé à ce lieu.

-Comment vas-tu ? Lui demanda-t-elle d’un ton presque las.

Il la regarda comme s’il ne la reconnaissait pas. Et depuis son hauteur, il avait de quoi faire frémir n’importe qui, elle ne frémit aucunement.

Mais il se rendit vite compte de son attitude. Il ne l’avait toujours pas dans les bras. Comment tenait-il ? Il reprit vite son aspect normal. 

– Neila. Ma Neila, s’écroula-t-il d’émotion.

Il était fou de constater la différence entre l’apparence qu’il avait quelques secondes plus tôt et celle qu’il avait maintenant. Une apparence humaine, faible.

– Je suis venue te dire en face que je ne veux plus te voir, rétorqua-t-elle séchement.

Il leva sa tête vers elle et lui fit face avec un air brisé et interloqué.

– Les sirons ne m’ont pas kidnappée, continua-t-elle en prenant un ton exaspéré. Je suis partie de mon plein gré.

Et d’un air sadique, elle rajouta :

– Je suis un siron.

Il ne fit pas une réaction. Il se contenta de demander à mi-voix: 

– Et loic aussi ?

– Oh mais bien sûr, répondit-elle comme si elle s’adressait à quelqu’un qui venait de suggérer une grande sottise.

Elle continua à s’adresse à lui pendant au moins dix minutes. C’était plus que le temps qu’il lui fallut pour la trouver. Neila parlait et ne le regardait dans les yeux que rarement. Elle parlait fièrement de sa trahison sans se donner aucune peine, pour ne pas le heurter. On dirait qu’elle attendait ce moment pour lui faire tout le mal possible. Pourtant, il en était sûr. Il ne méritait pas ça. 

C’était au moment où elle dit qu’elle était avec Loic. Ensemble depuis son départ, qu’il se releva à nouveau dans les air en la saisissant, puis en la projetant violement au sol.

Dés qu’il la lâcha, il eut une grimace, comme s’il regrettait déjà. Il se retransforma dans son apparence normal et se pencha sur Neila pour vérifier son pouls. 

Elle était morte.

Le domaine aux oliviers | Ecriture Nouvelle Récit Science Fiction

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